Avis de Mehdi El Morjani, Co-CEO de BONZAI Agency, sur le secteur du luxe.
Le Maroc n’échappe pas à la tendance mondiale des pays émergents où le luxe se positionne dans des secteurs aussi divers que l’immobilier, le tourisme ou le prêt-à-porter. Il répond à une demande grandissante des consommateurs aussi bien locaux que régionaux et jouera certainement à l’avenir un rôle majeur dans la démocratisation du luxe dans les pays voisins et d’Afrique en se positionnant comme hub régional.
Les grands groupes internationaux opérant dans le luxe connaissent très bien le Maroc et son potentiel, non pas comme marché cible puisqu’il reste marginal, mais comme marché émetteur et relais de croissance pour toute la région dans les 10 années à venir.
En juin dernier, d’ailleurs, plus de 300 professionnels du monde du luxe dont Francois-Henri Pinault, Sydney Toleadano ou encore Luca Cordero di Montezemolo, président de Ferrari, ont fait le déplacement à Marrakech dans le cadre du 8e sommet mondial du luxe. Le luxe est donc une carte à jouer pour le Maroc.
La question que l’on devrait se poser, par ailleurs, c’est comment le Maroc peut devenir un marché émetteur de produits de luxe.
Il est évident que le Maroc a un potentiel extraordinaire dans cette industrie. Il a une tradition séculaire de l’artisanat et du luxe et un réel savoir-faire dans ces métiers.
Ce qui nous manque, c’est des marques, de vraies marques capables de raconter une histoire, capables de faire rêver, de véritables marqueurs sociaux. Il en existe, il faut le dire, dans la haute couture, par exemple, Dahab, Oiknine, Tassi et j’en passe.
Malheureusement, l’évolution des sensibilités contemporaines et le brassage de plus en plus important des cultures, des styles et des comportements font qu’une marque de luxe se doit de s’internationaliser pour survivre.
On consomme du Louboutin de la même manière, à Casablanca ou à Bangalore, en le portant avec un caftan marocain ou avec un sari.
S’internationaliser non pas en développant un réseau important de magasins dans le monde mais plutôt en construisant son capital image. Ari Dein, marque de lingerie de luxe rendue célèbre grâce à la série Gossip Girl, ne possède qu’un petit store à Manhattan, pourtant sa notoriété dépasse les continents. Il y a quelques années, le challenge aurait été plus dur à relever, car on associait marques de luxe à flagships de 500 m2 payés rubis sur ongles, place Vendôme à Paris ou Bond street à Londres. Or, aujourd’hui, Internet joue ce rôle de vitrine et est profondément investi par les marques qui ont perçu son affinité profonde avec le luxe, et qui l’utilisent comme terrain d’expression privilégié.
Je suis persuadé que la diversité, la richesse et l’authenticité de l’artisanat et de la culture marocaine peuvent largement légitimer la création de grandes marques marocaines.
La force du Maroc vient avant tout du fait que notre pays est mondialement légitime sur le secteur de l’artisanat.
Elle vient aussi du fait qu’un réseau dense de fournisseurs performants s’est constitué autour des acteurs majeurs qui commencent à émerger comme Fenyadi et Itqane, qui a annoncé tout récemment l’arrivée de Hicham Lahlou comme directeur artistique.
Il faut néanmoins structurer la démarche, professionnaliser l’approche de création de marques en s’associant à des structures spécialisées. La clé du succès, on ne le dira jamais assez, c’est la marque !
Jean-Pierre Tagornet. La Vie éco
L’article sur : www.lavieeco.com
2012-12-25