Il y a quelques semaines, on me lisait écrire que la pyramide de Maslow s’était effondrée avec la première connexion Wi-Fi stable.
Clairement, ce n’était pas à prendre à la lettre mais la proposition n’en reste pas moins vraie selon moi ; la pyramide de Maslow s’est bel et bien effondrée.
Du moins dans le sens que les marketeurs n’ont cessé de lui donner depuis que le psychologue a eu la brillante idée de vouloir nous expliquer comment nous prenions les décisions de nos vies. Car croire en la pérennité d’une idée pareille n’est rien de plus pour moi que l’utopie de pubards paresseux qui refusent de se remettre en question.
Les seules pyramides qui tiennent encore sont celles des pharaons
On est quand même d’accord que depuis 1943, date à laquelle les résultats ont été publiés, le monde a terriblement changé. Tu m’étonnes qu’une étude psychologique menée pendant la 2ème guerre mondiale ressorte la sécurité comme besoin prioritaire ! Surtout qu’en 43, c’est le moustachu antisémite qui gagnait.
Sans faire dans l’inspection de travaux finis, la validité de la théorie ayant été démontrée au-delà du conflit de 39-45, il s’agit surtout de réaliser que l’évolution du monde a changé assez fortement les comportements humains pour les invalider.
Avec l’avancée scientifique, la numérisation du monde, puis sa dématérialisation, les humains ont accédé à des niveaux de confort et de qualité de vie inédits dans notre histoire alors que nous sommes plus nombreux que jamais.
Les priorités de stabilité, précédemment indispensables à l’humain moyen, commencent à prendre du recul face à d’autres aspirations d’accomplissement. Nés dans un monde n’ayant pas connu de conflit total depuis un demi-siècle, les Gen Z n’ont pas autant la crainte de la guerre que l’envie de la paix. A l’ère du tout low cost, ils ne s’inquiètent pas pour leurs besoins élémentaires, ils savent qu’ils trouveront toujours comment les combler.
Selon Total Youth Research, 71% des GEN Z américains dépenseraient leurs derniers 10 dollars à recharger leur téléphone plutôt que pour manger ! Si l’un des patients de Maslow lui avait dit ça, il lui aurait probablement diagnostiqué des tendances à l’autodestruction doublées d’un état dépressif. En 2017, c’est le fils des voisins qui prépare son bac. Génération de la connexion sociale par excellence, les Gen Z ont l’air de valoriser la récompense mentale d’une conversation à celle biologique d’un repas.
Mais les Gen Z ne sont pas seulement des boulimiques du web à l’appétit frugal, ils sont aussi 61% selon RYMAX à envisager l’entrepreneuriat comme carrière. Encore un coup dans le mythe de la sécurité avant tout. Une génération où les deux tiers envisagent de gagner leur vie dans la posture imprévisible de l’entrepreneuriat n’a pas l’air de craindre le risque.
De son côté, Interactions Marketing reporte dans une étude menée en 2015 que 61% des Gen Z préféreraient dépenser pour une expérience au lieu de s’offrir un objet matériel.
Dans un siècle techniquement évolué, à la société dématérialisée, les aspirations hédonistes l’emportent sur les élans concrets du quotidien. Même dans ses comportements d’achat, le natif du 21ème siècle clame qu’il est plus qu’un corps dont il faut assouvir les besoins, c’est un esprit qui a envie d’être intéressé.
Le loft d’Epicure, ou le plaisir comme insight suprême
Tout ce qui a été décrit peut être considéré, à juste titre, marginal. Ces tendances s’appliquant pour l’instant à une démographie plutôt limitée : les millenials occidentaux. Mais si l’histoire récente a été d’un quelconque enseignement, c’est bien que les délais de pénétration s’accélèrent et ce qui est maintenant une particularité d’adolescents du premier monde deviendra plus vite qu’on ne le croit une constante universelle.
Sans oublier une chose, ces ados entreront dans moins de 10 années dans la période la plus dépensière de leurs vies. Si ces insights les accompagnent vers l’âge adulte, ce sera d’après moi, le règne d’Epicure. Un monde où l’aspérité et le plaisir surpassent le besoin.
Il nous faudra donc réapprendre à penser nos cibles, considérer ses comportements non dans une hiérarchie des besoins mais dans un joyeux chaos de l’envie. Car les envies ne se hiérarchisent pas, elles sont satisfaites !
Alors, dans ce grand loft d’Epicure, nous aurions un coin bien-être et acceptation de soi, un espace épanouissement, une mezzanine de la sociabilité et une immense terrasse de l’excitation…
Les symptômes d’une telle transition se sont déjà manifestés et nous en sommes tous à un niveau ou un autre des agents ; le storytelling, le brand content entre autres ne sont finalement que les manifestations d’une nouvelle dynamique de marque, ancrée dans l’aspérité et l’émotion. Ne plus répondre au besoin des gens, les aider à réaliser leurs rêves.