The Rolling Notes publie les bonnes feuilles du livre «Brand content stratégique 2018» qui vient de paraître. Cet ouvrage, organisé autour de quatorze questions, fournit des clés pour réussir sa stratégie éditoriale.
Voici dix tendances émergentes en termes de contenu de marque, illustrées par des extraits du livre.
1. Développer des écosystèmes de contenus
L’enjeu pour une marque en 2018, c’est de créer son écosystème de contenus en jouant simultanément la carte du physique et du digital, du gratuit et du payant, tout en répondant à tous les besoins d’informations.
Exemple. Le remarquable écosystème de la marque de barbecue Weber, qui associe :
- Une collection de livres (dont La Bible du Barbecue).
- Une mise en situation dans des lieux (restaurants Weber Grill, Weber Store).
- Des événements et animations pour stimuler les usages (Weber Grill Tour/démonstrations de chefs; Weber Grill Academy/cours de barbecue de 1,5 à 3 heures, à partir de 39 euros ; championnat de France de Barbecue).
- Divers contenus vidéo online (dont Les aventuriers du Grill et le Barbequizz).
- Des partenariats (avec le film Barbecue, sorti au cinéma en 2014).
2. Établir des chartes sémantiques pour être crédible sur le Web
Le digital donne un poids croissant aux contenus écrits, oraux et visuels. Aux marques de trouver leur partition, leur registre et leur tonalité.
Divers outils sont proposés pour canaliser l’expression verbale de l’entreprise :
- L’agence Angie parle de «gouvernance du capital langage» et de «profil sémantique», proposant des «plateformes d’identité verbale».
- Le groupe de communication Makheia insiste sur le «spectre éditorial», au croisement de la plateforme de marque, du patrimoine éditorial et des data content.
- Jeanne Bordeau, de L’institut de la Qualité de l’Expression, promeut le «design de langage» et la «charte sémantique», qui apporte sens et distinction.
- Le chercheur Patrick Mathieu met en évidence une corrélation statistique entre la «singularité»d’un individu et d’une entreprise et son vocabulaire spécifique.
3. Rationnaliser la gestion de sa bibliothèque de contenus via des plateformes technologiques
Allianz Partners utilise Wiztopic Insiders, une plateforme privée pour centraliser ses contenus de marque. Anne-Claire Bennevault, directrice Marketing Monde explique: «La plateforme technologique Wiztopic nous permet de distribuer des contenus de façon centralisée à nos collaborateurs, partout dans le monde. Chaque équipe peut être alertée de la mise à disposition de nouveaux éléments et y accéder facilement. Nous pouvons cibler les contenus par thématique et référencer aisément les ressources déjà existantes au sein du groupe. Nos contenus, disponibles dans plusieurs langues et formats, peuvent rapidement être adaptés à nos spécificités locales. Ainsi, nos ressources sont ré-exploitées en continu à l’échelle du groupe. Notre stratégie de content marketing, lancée voilà un an, nous permet de réaliser une économie substantielle en termes de logistique et de coûts de production, tout en assurant la cohérence de nos messages à l’international. La plateforme Wiztopic, grâce à sa simplicité d’utilisation, a été un atout majeur dans la réussite de notre projet, qui compte déjà plus de 300 utilisateurs actifs chez Allianz Partners.»
Lors du symposium Adobe 2017, Moët Hennessy a pour sa part présenté un dispositif pour gérer le DAM (Digital Asset Management) et le PIM (Product Information Management). A partir du logiciel Adobe Experience Management, Moët a centralisé l’accès aux actifs créatifs de ses 19 maisons dans 40 pays. En un an, cette plateforme, baptisée Ai®, a permis de répertorier 19 000 actifs, avec 60 formats, de l’hologramme à l’image 3D. 1 500 personnes gagnent ainsi du temps mais aussi deviennent aussi plus rigoureux dans la façon de créer du contenu et de le diffuser. Ces contenus sont articulés aux catalogues produits d’Alkemics, aux fiches produits des e-retailers, et aux réseaux sociaux. Avec des systèmes d’autorisation, la gestion de la bibliothèque d’actifs est facilitée. Objectif: libérer la créativité, grâce à une organisation beaucoup plus efficace.
4. Miser sur les fiches produit, point de contact clé, pour les sites de e-commerce
Pour vendre à distance, il faut s’exprimer dans le cadre contraint des marketplace, en trouvant les bons mots et les bons visuels.
Sur une marketplace, c’est le prix et la qualité du contenu descriptif des produits qui assurent la conversion vente. Depuis 1987, Téléshopping démontre qu’on peut vendre à distance grâce au contenu. Téléshopping diffuse simulations, démonstrations, témoignages d’utilisateurs ou d’experts ; car le fait de comprendre, de connaître, fait partie intégrante de la démarche d’achat.
Amazon, de son côté, invite toutes les marques à remplir avec attention leurs fiches-produit en respectant des guidelines: 5 key selling points de 135 caractères maximum, une présentation détaillée. Il est impératif de rester factuel et d’éviter toute argumentation excessive: «Avoid time sensitive information such as «now»/«new»/«latest»/«yet»/«on sale now»/«the latest product»/«the best yet». Focus on the facts and stay away from adjectives such as ‘cool’ or ‘fun’». La partie Description du produit, qui apparaît lorsqu’on clique sur Voir plus de détails est l’occasion d’éclaircir les contextes d’utilisation et de raconter la culture de la marque.
Quant aux e-commerçants, ils développent des espaces dédiés aux marques: Amazon A+ Pages ou Description du fabricant en France permettent de diffuser photos, vidéos et autres conseils aux couleurs de la marque tout en respectant le format du distributeur. Un espace proposé en option payante par Amazon. La page Bose, tout en photos et vidéos sur Amazon, se négocie ainsi 500 000 dollars par an !
5. Faire appel à ses collaborateurs pour produire et diffuser du contenu
Via les médias sociaux, les collaborateurs d’une entreprise sont très bien placés pour toucher de façon crédible des publics clés: prospects et clients, candidats, partenaires, journalistes, influenceurs… Inciter le collaborateur à participer à la réputation de l’entreprise, c’est «l’employee advocacy». A la marque de détecter, de former ses ambassadeurs et de les inviter à s’exprimer sur l’innovation, les produits (social selling), les ressources humaines, la responsabilité sociétale de leur entreprise…
La plateforme Sociabble, de Brainsonic, favorise ainsi l’amplification de contenus créés ou relayés par les collaborateurs. Elle agrège les contenus de l’entreprise dans des canaux thématiques, stimule leur diffusion sociale via les collaborateurs et mesure l’impact de l’activité de partage. Les collaborateurs peuvent être récompensés en fonction des interactions qu’ils suscitent. Selon la Villa Numeris, 5% des salariés prennent la parole au nom de leur entreprise (25 % dans les entreprises de moins de 50 salariés).
6. Se doter d’une content factory en interne pour produire du contenu en masse
De plus en plus de grandes entreprises ont lancé ou envisagent de créer une content factory ou un content studio en interne (Air France, Marriott, L’Oréal, BNP Paribas Cardif, Axa, Adidas, Coty…), avec une équipe chargée de produire en continu du contenu et qui peut faire des prestations pour d’autres entités du groupe. Depuis 2015, Adidas s’est ainsi dotée d’une newsroom de 12 personnes et travaille avec une centaine de talents extérieurs: flasheurs, illustrateurs, photographes, monteurs vidéo… Pour répondre à cette démarche, Havas Group a lancé pour sa part le Content Studio Consulting.
7. Fabriquer différents types de contenus simultanément et de façon cohérente
Prodigious, le studio de création de Publicis, a mis en place un process de production pour centraliser les besoins des différents pays et services. Le principe: shooter simultanément les campagnes, tutoriels, contenus sociaux, variantes internationales, avec jusqu’à des centaines de contenus produits en même temps. Objectifs : anticiper tous les besoins, regrouper les demandes, optimiser le budget, assurer une gestion des droits pour tous les territoires et garantir une cohérence de style avec une excellente qualité d’exécution.
Toujours au sein du groupe Publicis, le Loft est un lieu ouvert et agile où une équipe dédiée travaille en continu sur des projets avec des créatifs de l’agence et des talents extérieurs (scénaristes, illustrateurs, journalistes, youtubers, etc.).
8. Faire appel à des talents artistiques
Les contenus artistiques (brand art, artketing) sont appelés à jouer un rôle essentiel pour les produits, les lieux de vente et la production éditoriale.
Gilles Lipovetsky constate qu’on est entré dans une logique de consommation émotionnelle: «On achète des produits pour vivre un semblant d’aventure et de beauté. La consommation est la recherche d’expériences nouvelles, un appel à la jeunesse perpétuelle et un refus de la répétition et de la routine.» Dans un entretien à Libération, il indique: «Nous sommes maintenant des drogués de la nouveauté. Il n’y a pas de limites à la recherche d’expériences sensibles et surprenantes».
L’art, de la poésie aux arts plastiques, est un moyen pour les marques de réjouir un homo aestheticus à l’affût de sensations nouvelles. Le site de curation créatif Fubiz relève chaque jour des exemples de collaborations Artiste/Marque en photographie, vidéo, design, pop culture, arts plastiques, street art, etc. Y figurent deux installations de street art créées pour Nike: le playground Duperré, rénové par Ill studio, et une fresque sur un terrain de basketball à Barcelone, par l’illustrateur londonien Neil Stevens.
9. Utiliser les lieux et les événements pour diffuser des contenus
Les lieux, permanents ou éphémères, donnent aux marques un espace d’expression idéal pour faire vivre l’expérience de marque.
Les contenus et les lieux, formes de «rich content», sont des moyens essentiels pour faire vivre la marque et mettre en scène ses valeurs. Ce sont de nouvelles voies symboliques, émotionnelles, sensorielles, sociales et expérientielles pour véhiculer toute leur richesse auprès de leurs publics.
Pour faire vivre ces expériences, les marques créent des lieux de sociabilité: café, bar, restaurant, hôtel, parc d’attraction, musée… visités et analysés pour le groupe SoLocal à la demande de Gérard Lepneveu et ont donné lieu à un Livre blanc.
10. Parier sur le potentiel du brand content local et régional
Si la plupart des dispositifs de brand content sont conçus au plan national, il existe un fort potentiel de création de contenus régionaux en France : cette échelle de proximité offre des gisements de sujets aux PME comme aux grandes entreprises.
Exemple remarquable: Chevron, premier employeur de la ville de Richmond en Virginie aux Etats-Unis, a créé le site d’actualité de la ville. La compagnie pétrolière Chevron anime The Richmond Standard, journal en ligne enrichi chaque jour au gré des rubriques News, Community, Lifestyle, Sports, Jobs, Chevron Speaks (contenu à destination des collaborateurs et de leur famille), Spanish (infos en espagnol).
Der Weg-Begleiter (compagnon de route en allemand) est le nom du mini-guide touristique d’une coopérative de taxis de Hambourg. Il est le fruit des contributions des chauffeurs, fiers de vous l’offrir à la fin de la course.
Bien d’autres tendances ont été abordées dans Brand Content Stratégique 2018, qui a bénéficié de l’éclairage d’une trentaine d’experts. La version papier de cet ouvrage peut être commandée via le formulaire suivant.
Daniel Bô, l’expert du Brand Content et de la Brand Culture
Daniel Bô est le PDG de QualiQuanti.
Etudes : diplômé d’HEC Paris (1984) et de SciencesCom (1986) Académie Carat Espace (1990).
1987-1989 : devient publicitaire chez Saatchi, Lintas et Equateur.
1990 : fonde l’institut d’études QualiQuanti.
1990-2016 : évalue plusieurs centaines de contenus (émissions TV, chaînes thématiques, films ; magazines, sites Internet, applis…) et mène des recherches sur le parrainage TV, le placement de produits, le publi-rédactionnel, la publicité digitale
2007 : publie la première étude sur le brand content.
2009 : co-écrit Brand content (Dunod). Initie avec Emmanuelle Prache le Grand Prix du Brand Content.
2013 : fait paraître Brand culture (Dunod).
Août 2016 : lance le Brand Content Institute.
Décembre 2017 : sortie de Brand Content Stratégique 2018, concentré de dix années de recherche, d’études inédites, d’échanges avec des professionnels et de milliers de cas analysés.
Surnommé «pape du brand content», il défend une approche du brand content, qui donne du sens et éclaire l’arrière-plan culturel des marques. Il s’intéresse aux lieux permanents ou éphémères comme territoire d’expression à conquérir pour les marques.