Il y a quelques semaines, une jeune chanteuse marocaine prenait, je dois dire dans l’indifférence générale, une décision radicale : bloquer ses followers « passifs » et « fantômes ». Raison invoquée et mots bien choisis de petite fille gâtée : « Je n’aime plus la qualité de mes abonnés ».
La demoiselle se plaignait du manque d’engagement de sa fanbase, de la faiblesse des interactions (peu de j’aime, peu de commentaires) et décrétait le début d’une nouvelle ère, celle des vrais abonnés « productifs ». Soit.
Nous sommes d’accord qu’il s’agissait d’un épiphénomène, et qu’on parlait alors exclusivement d’Instagram, mais ce caprice avait le mérite de rappeler que, sur les réseaux sociaux, une communauté, ce ne sont pas seulement des fans, mais aussi et surtout des interactions, que la qualité des fans prévaudra toujours sur leur quantité. Dès lors, comment évaluer la qualité de vos fans ? Et fans de qualité sont-ils toujours synonymes d’interactions, d’influence, de recommandation… et de conversion ?
Mais pourquoi se priver de fans ?
Le nombre de fans comme mètre-étalon de l’influence numérique
Réduire une page, quelle qu’elle soit (Facebook, Instagram, Linkedin, Twitter… institutionnelle, commerciale ou personnelle), à son compteur de fans est indéniablement une façon biaisée d’appréhender la performance d’une présence sociale.
Et pourtant, c’est aujourd’hui l’appréciation purement quantitative qui créé les pseudo-influenceurs. On mesure la valeur de ceux qui parlent le plus fort sur la toile par rapport au nombre de fans qu’ils comptabilisent. Un internaute qui hésite entre deux produits, ou deux marques, va choisir (et être impressionné par) celui qui a le plus de likes.
Le nombre de likes guide notre regard, notre choix et notre perception. Nous l’envisageons comme un gage de crédibilité : si les autres n’aiment pas, pourquoi aimerais-je ? En tant que marketeurs, ce constat oriente certains de nos investissements publicitaires, convaincus que nous sommes qu’augmenter la fanbase d’une marque ne saurait être totalement décorrelée de la conversion commerciale.
C’est aussi le cas de Google : le nombre de fans, notamment sur Facebook, peut bonifier le référencement sur le moteur de recherche (ce qui peut, lui, représenter un impact réel sur le chiffre d’affaires) et fonctionne comme un baromètre de l’influence numérique.
Et pourtant, il faut prendre le temps de prouver l’efficacité d’une base d’abonnés plus réduite, mais active. Un fan social n’a de valeur que s’il interagit avec votre marque, s’il visite régulièrement votre page. Un fan acheté notamment, comme ce fut la mode il y a encore quelques années, n’a donc aucune valeur en soi, si ce n’est d’apparaître dans le décompte des fans. Faux-lowers, fans achetés, fans non ciblés ou fans affinitaires : les fans n’ont pas tous la même valeur, et qui dit communauté désengagée, dit visibilité nulle.
Tous les fans ne naissent pas égaux en valeur :
Dis-moi comment on te like, je te dirai ce que tu vaux
Personnellement, je peux liker une marque mais ne pas la consommer. Je peux la liker, mais acheter son concurrent. Je peux même être inconditionnelle d’une marque sans avoir l’idée de la suivre en ligne. Ce constat me fait me questionner sur la propension des fans d’une page à dépenser plus. Ne confond-on pas ici cause et conséquence ? Suivre une marque augmente-t-il la probabilité d’acheter ses produits ? Ou n’est-ce pas surtout les gens qui achètent déjà une marque qui sont plus susceptibles de la suivre ?
Je considère globalement que les internautes qui ont décidé de devenir fans d’une marque possèdent une attention particulière pour cette marque, et qu’une page est souvent le rassemblement de personnes qui nourrissent déjà des sentiments positifs à l’égard d’une marque, mais qu’aimer (sur Facebook) n’a pas le même poids qu’une recommandation ou une amitié dans le monde réel.
C’est aussi sans compter sur certains utilisateurs qui aiment certaines marques par hasard, de manière ponctuelle ou opportuniste ou ceux qui, à moins de visiter délibérément la page, seront probablement très peu exposés aux contenus qu’elle produit dans leur fil d’actualité, par la magie des algorithmes (Facebook notamment) qui se chargeront de les filtrer.
Liker, c’est bien.
Interagir, c’est mieux.
Liker constitue donc, pour moi, un soutien très faible : lesquels de vos fans seraient-ils réellement prêts à s’engager pour votre marque ? A la recommander ou à la défendre contre des avis négatifs, si une opportunité se présentait ? Seuls les véritables fans, qui s’engagent et valorisent la marque, écriront un commentaire, cliqueront haut et fort contre les plaintes injustifiées ou seront les premiers à tester les offres, les adopter et en parler.
La recommandation est donc prédite à de beaux jours, et Facebook l’a bien compris : le réseau ne fait désormais paraître vos publications qu’à quelques-uns de vos fans, observe comment ils réagissent, puis les partage avec d’autres dans les fils d’actualité en fonction de leur taux d’engagement (clics, likes, commentaires, partages).
Objectif de Facebook : encourager l’utilisation de la publicité payante pour pousser les contenus de marque, mais aussi proposer aux utilisateurs le contenu qui leur est le plus pertinent et proposer ainsi la meilleure expérience possible sur son réseau.
Les interactions ont donc un bel avenir devant elles comme baromètre de la performance sociale, et pour nous, internautes, pour qui les avis et commentaires sont devenus cruciaux. Mais cette nouvelle mécanique de diffusion exige désormais des publications des marques de faire leurs preuves : si vos posts engagent, et réalisent un nombre élevé de likes et de commentaires, ils seront montrés au reste de vos followers… Si vos fans n’interagissent pas, Facebook en conclut que la publication a peu d’intérêt et il ne la met pas en avant. La qualification des fans devient donc un élément central.
Trier, c’est écologique :
Stop à la course aux fans
Les fans qui ne cliquent donc jamais sur « j’aime », ne partagent jamais, ne laissent jamais de commentaires ou ne publient pas ne se contentent donc pas de constituer une communauté silencieuse. Les fans qui ne font rien vous font du tort : ils pénalisent votre taux d’engagement.
Ce constat est amer pour de nombreuses pages qui, après des années de techniques d’acquisition agressive, se retrouvent aujourd’hui avec des communautés peu qualifiées et peu engagées. Autrefois indicateur chéri, le compteur de fans ne déclenche plus les mêmes réactions d’enthousiasme.
Limiter l’accès à sa page aux seuls profils susceptibles d’être intéressés par vos publications est donc une bonne pratique qui doit être réalisée en ayant pris soin de catégoriser vos utilisateurs. L’audience de pages préférées, l’invitation des utilisateurs qui ont interagi avec vos publications (sans liker votre page), et surtout le monitoring régulier des fans entrants vous permettront de favoriser l’acquisition de fans affinitaires et qualitatifs.
Surtout, une base de fans doit être promise aux mêmes logiques de CRM et d’animation que les bases email. En devenant fans, vos prospects et clients prêtent leur image à votre marque, et attendent en retour un service parfait et des avantages à vous suivre.
La meilleure façon d’être liké…
Entretenir la qualité de vos fans et vos ratios d’engagement passe donc par la production de bons contenus qui vont déclencher des likes basés sur l’enthousiasme et l’envie de partager.
Choisir une ligne éditoriale, publier du contenu pertinent et de qualité, visuel, inspirant, divertissant, qui surfe sur les centres d’intérêt de vos fans et les publications qui obtiennent déjà les meilleurs taux d’engagement, mais aussi engager la discussion au bon moment, à la bonne cadence, vous permettront de recruter des fans affinitaires, de contourner habilement les algorithmes et d’obtenir intelligemment de l’engagement.
On privilégiera ici la croissance organique sur le principe que les internautes se donnant la peine de chercher et de trouver une marque sur les réseaux sociaux seront des fans plus dévoués.
L’idée est aussi de semer des soutiens sur les réseaux sociaux en s’associant non seulement à des influenceurs, mais aussi en valorisant les contenus créatifs générés par les internautes engagés. Plus éloquents que de simples likes, ceux-ci sont à même de générer de l’influence et de la prescription, et de faire de vos fans un panel de clients en puissance.