«What else ?» : il suffit parfois de deux mots et d’un point d’interrogation pour construire une success story…
Keep it short
Les amateurs de jeux de mots et de publicité connaissent la force de frappe des slogans courts. Qu’on ait ou non le budget communication d’une grande multinationale, un slogan court et efficace a la capacité de s’ancrer rapidement et durablement dans les esprits. Direct, simple, à la fois prétentieux et plein d’humour, «What Else ?» est devenu l’un des slogans les plus marquants de ces dix dernières années.
Immédiatement associé à la marque Nespresso, fleuron du groupe Nestlé, ce slogan a enregistré dès sa première année d’exploitation un score d’agrément de 85%. Il aurait permis à la marque du café en capsules d’augmenter ses ventes de plus de 40% depuis 2006, d’atteindre 3 millions de membres au sein de son très exclusif club Nespresso, et de devenir ainsi leader du café encapsulé dans le monde. Alimentant des « mèmes » et des détournements en tout genre, «What Else ?» est surtout aujourd’hui entré dans la culture populaire. Iconique !
Son secret ?
Une formule interrogative, qui interpelle de manière directe le consommateur, alors que les concurrents cultivent le déclaratif («Lavazza, le café préféré des Italiens», «Carte Noire, désir d’intensité», «L’OR Espresso : Faites plaisir à vos sens», «Café Royal : Au service du bon goût», …).
La recette d’un bon café : humour, snobisme et auto-dérision
Si ce slogan a si bien trouvé son public, c’est surtout qu’il cultive l’arrogance tout autant que l’auto-dérision, une dualité qu’incarne si bien George Clooney. L’acteur-réalisateur-activiste-sex symbol a prêté sa voix suave, ses costumes Armani, sa décontraction et sa sophistication à la saga publicitaire orchestrée par Nespresso pendant 10 ans, de 2006 à 2017.
Nous voilà avec lui plongés dans une ambiance design, luxueuse et feutrée, celle des boutiques toutes de noir laquées, ou des villas du lac de Côme, dans lequel la pause-café devient une expérience branchée et haut-de-gamme. Chez Nespresso, on ne boit pas du café. En gourmet, en connaisseur, on fait l’expérience d’un cru d’exception.
George Clooney lui-même, amateur de café et propriétaire d’une machine Nespresso, aurait spontanément proposé ce célèbre slogan qui n’a jamais fait l’objet de traductions. Il cultive, en version originale, son charme très international et incarne l’art de vivre «façon George».
«Quoi d’autre ?» en serait, en français, une traduction littérale imparfaite. «De quoi croyez-vous qu’on parle ?», «Que vouloir de plus ?», «Que peut-on imaginer de mieux ?» ou encore «Le plaisir ultime» sont bien plus évocatrices. «What Else ?», c’est une manière de dire que le café Nespresso est incomparable. Comment oserait-on en choisir un autre ? Comment ne mériterait-on pas le meilleur ?
George Who ?
«Sombre, intense, équilibré, unique, mystérieux, un corps puissant, subtil et agréable, avec une forte personnalité…». Chaque spot Nespresso est conçu comme une mini-bande dessinée qui surfe sur le stéréotype de la star égocentrique et narcissique.
Le fantasme de toutes les femmes, l’archétype du séducteur encaisse ici dignement les rebuffades féminines, dévalorise ses propres charmes et s’efface au profit du seul concurrent qui vaille : le café Nespresso.
George Clooney joue avec son image face à des femmes qui mettent en œuvre (délibérément ou non) les pires stratagèmes pour lui chiper son Nespresso : depuis celle qui lui tend les clés de sa voiture en le prenant pour un voiturier à celle qui lui fait les yeux doux pour mieux l’amadouer, en passant par la peste qui lui sous-entend qu’il est beaucoup plus petit qu’à l’écran ou encore les deux amies dont il s’imagine qu’elles le décrivent alors que leurs compliments s’adressent en fait aux irrésistibles Nespresso qu’elles sirotent à petites gorgées…
Son identité est niée, son statut de star ne lui donne aucun privilège.
Constamment tourné en ridicule, George n’en est que plus attachant. Il met en valeur les femmes (chipies, coquines, intelligentes, stratèges…) et rassure les hommes (aucun homme n’est tout puissant, pas même George Clooney).
Des guest stars pour réinventer la saga
John Malkovitch, Jean Dujardin, Matt Damon, Danny DeVito, Jack Black… A partir de 2009, après trois spots réalisés avec George Clooney, la marque Nespresso a recruté d’autres célébrités pour lui donner la réplique, et renouvelé ainsi la saga du café élégant et de qualité.
Pas de changement de ton, ni de changement de style. Le fil conducteur entre humour et auto-dérision a été maintenu. Danny DeVito qui reçoit une leçon de style «spécial Nespresso». Après tout, la dégustation est un sport de luxe : elle nécessite un entraînement haut-de-gamme, à l’image d’une formation à l’art, la gastronomie ou à la mode !
Tout aussi complices, bien que concurrents, Jean Dujardin et George Clooney mettent en jeu une capsule de café contre de belles chaussures en cuir puis contre un plongeon dans le lac de Côme, dans un jeu de regards sous-titrés «How far would you go for a Nespresso» («Jusqu’où iriez-vous pour un Nespresso»).
What else après George ?
Indéniablement, il y aura pour la marque Nespresso un avant et un après George Clooney. En s’associant à la star américaine, égérie engagée et crédible, la marque aux capsules a signé le partenariat gagnant.
Elle a réussi son déploiement mondial et consolidé son image premium de marque haut-de-gamme et branchée, qui commercialise des cafés d’exception.
Mais ne s’est-elle pas aussi rendue dépendante de Clooney ? Certains experts disent la marque vampirisée, cannibalisée par son égérie. Est-ce vraiment le cas ? Qui pense Nespresso pense George Clooney, et inversement. Indéniablement, la star n’a pas éclipsé la marque, et la marque sort plus forte de l’association.
Cette saga publicitaire nous enseigne surtout que le Celebrity Marketing peut éviter l’écueil de la vampirisation si l’histoire racontée est sincère et convaincante. Et c’est indéniablement le cas avec «What Else ?».
Depuis la fin du contrat avec Clooney, Nespresso a dû s’affranchir de ses codes de communication habituels : sa dernière campagne met en scène les mugs oubliés qui, au fil des années, ont été abandonnés et retrouvent une seconde vie grâce à la machine spéciale grandes tasses Vertuo.
Les prochains mois nous diront si cette nouvelle communication «utilitaire» réussira à prendre le relais d’une communication longtemps identitaire, qui a durablement bouleversé les équilibres sur son marché.
Affaire à suivre.
je veux faire un bisous a gorges Clooney
Bonjour ! Merci pour votre commentaire. Il vous suffit de nous l’envoyer, nous nous chargerons de le transmettre 😉 Bonne journée.